Décrire un paysage à l’oral et réaliser un croquis avec Duplik

, par Kevin Zanotti

Capacités  : Compléter ou réaliser un croquis simple de géographie. Décrire une situation géographique.
Thème : La recomposition du territoire urbain en France : métropolisation et périurbanisation.
Repère  : Les espaces périurbains dans la région administrative de l’élève.

Duplik un jeu déculpabilisant !

Il est souvent difficile de faire décrire un paysage à des élèves en difficultés car ils se contentent souvent du minimum. Les élèves connaissent la capacité de « décrire une image » mais ils n’y voient pas l’intérêt car ils ne la relient pas à l’analyse qui doit l’accompagner (voir fiche Eduscol Décrire)
Il semble encore plus difficile de leur faire réaliser des croquis, même très simples, car beaucoup d’élèves disent « ne pas savoir dessiner » (or ce n’est pas réellement ce qu’on leur demande).
La ludification (avec Duplik) peut être un moyen pour motiver et déculpabiliser les élèves en les confrontant à leurs difficultés sans qu’ils ne s’en rendent compte.

La démarche :

  Cette séance se situe au cœur de la séquence. Elle est organisée sur une heure de demi groupe (ou une heure d’AP) afin de limiter le nombre de participants à 12.
  L’objectif est de décrire des paysages périurbains (ici, la ville de Marines dans le 95) et d’en réaliser des croquis.
  Les paysages sont sélectionnés à l’avance par le professeur en utilisant Google Street View.

Déroulement de la séance :

  Lancement de séance : L’enseignant localise la ville de Marines à l’aide de Géoportail. Les élèves rappellent ce qu’est la périurbanisation.


  Le professeur donne la règle du jeu* (voir en fin d’article).
  Les élèves passent un par un à l’oral pour décrire un paysage (que les camarades ne peuvent pas voir). Les autres élèves l’écoutent et réalisent un croquis en utilisant le maximum d’informations données par l’élève qui décrit le paysage. Ensuite on compte les points au tableau et on passe à l’élève suivant.
Tous les élèves vont donc passer à l’oral durant la séance.
  Fin de séance : Les élèves collent dans le cahier la photo du paysage qu’ils ont décrit (afin de garder une trace de cet exercice). Collectivement, les élèves proposent une conclusion pour caractériser les paysages périurbains. Par exemple une classe d’électrotechnique a proposé : "Marines est une ville périurbaine car ce n’est pas loin de la ville de Cergy mais c’est la campagne. Les paysages sont très différents : il y a des champs et des usines, des petites maisons".

Compte rendu d’expérience :

  Les élèves ont participé avec entrain à l’activité. Ils étaient volontaires et ils auraient même aimé refaire ce jeu la semaine suivante.
  Les élèves comptaient eux-mêmes leurs points. Il s’agit d’une auto-évaluation. Cela a provoqué à la marge quelques dérives. Je n’ai pas vu d’élèves qui trichaient ouvertement, mais certains étaient indulgents avec eux-mêmes ! J’aurais pu faire une évaluation par les pairs mais cela aurait pris plus de temps. (Il est possible de donner une grille d’évaluation, mais on ne peut la donner qu’après la réalisation de chaque croquis. Cela aurait donc tendance à ralentir le jeu.)
  Le temps de retour sur la notion de périurbanisation a été très court (un peu en fin et en début de séance). Les élèves ont donc développé des capacités durant cette séance mais peu de connaissances. Ils ont par contre spontanément utilisé beaucoup de lexique spécifique à la matière (« premier plan, arrière-plan, centre-ville, campagne  »…)

L’oral en histoire géographie, une capacité trop souvent oubliée.

Dans un compte rendu de formation proposée à Amiens , Maribel Carrizo et Mélanie Weyl avancent que la plupart des séances d’histoire-géographie contiennent des moments d’oral, mais qu’il s’agit le plus souvent d’un cours dialogué (questions-réponses). Il est rare de mettre l’oral au cœur de la séance (exposés, débats, enregistrement, jeu de rôle…). L’intérêt de cette séance a été de permettre aux élèves de travailler pendant plus de 30mn spécifiquement l’oral.
De plus, à ma grande surprise, j’ai constaté que les corrections entre élèves étaient riches et spontanées. En effet lorsqu’on travaille l’oral, on demande souvent aux élèves de critiquer leurs camarades (par exemple après un exposé), mais les critiques sont alors assez pauvres. Ici le but de chaque élève était de gagner. Or, si l’élève qui passe à l’oral ne décrit pas bien le paysage, il est impossible pour les autres de marquer des points. Les élèves ont donc très vite conseillé leurs camardes (« parle plus vite », « parle plus fort, j’entends rien ! », « C’est devant ou au fond ? » …) J’ai ainsi constaté un net progrès entre les premiers passages (un peu timides) et les derniers (beaucoup plus débridés).

Le croquis en géographie

On ne peut pas affirmer que les élèves ont ici réalisé des croquis proprement géographiques. [1]

Exemple de production d’un élève :

Réaliser un croquis en géographie demande une démarche rigoureuse (voir article : Croquis le port du Havre). Mais à travers ce jeu, les élèves ont accepté de se lancer dans des brouillions. Avant de réaliser des croquis en autonomie, il faut passer par des étapes intermédiaires (comme compléter un croquis ou rédiger la légende d’un croquis). Il faut voir cette activité comme un moment de travail pour déculpabiliser les élèves par rapport au croquis : « Oui ce n’est pas très beau ! Mais ce n’est pas grave ce n’est pas le but ». Les élèves doivent prendre conscience que ce qui est important est moins la qualité du dessin que la présence ou non des informations recherchées. Ainsi, on voit dans l’exemple que l’élève a spontanément utilisé des représentations graphiques (hachures pour les espaces verts, cubes pour les bâtiments…). On pourrait d’ailleurs demander à l’élève qui a réalisé ce dessin, d’élaborer lui-même une légende par exemple lors d’un travail à la maison.
En ce sens, cette activité est intéressante. Mais il me semble qu’elle doit être complétée rapidement par un travail sur croquis plus conventionnel afin de réinvestir les capacités acquises durant cette séance ludique. Ainsi dans la séance suivante, j’ai demandé aux élèves de réaliser un croquis de l’urbanisation dans l’aire urbaine parisienne, en situant Marines et Cergy.

Conclusion :

Cette séance peu conventionnelle a de nombreux atouts : dynamique, interactive, originale… Mais il faut rester vigilant et ne pas se satisfaire d’un bon moment passé avec les élèves.
Un travail durant la séance pour réintroduire les notions de géographie et un travail de tuilage après la séance pour réinvestir les capacités travaillées restent indispensables.
Comme souvent dans les séances centrées sur l’oral, certains élèves en difficultés se sont révélés. L’oral leur offre la possibilité d’exprimer leurs capacités en dépassant leurs difficultés liées à la pratique de l’écrit.

Règle du jeu :

Duplik est un jeu de description et de dessin. Un joueur prend une carte. Celle-ci représente une photo de google Streetvu. Dans un temps limité (1 minute 30), le joueur principal doit décrire la photo avec le plus de détails possibles. Pendant ce temps, les autres joueurs dessinent. Ensuite, l’enseignant lit 5 détails à haute voix et les élèves comptent leurs points. Pour chaque détail présent sur leur dessin, les joueurs gagnent 1 point et le joueur principal 1 point si au moins 3 camarades ont la bonne réponse. Puis, un nouveau joueur devient le joueur principal.

Exemples de détails à dessiner :

Marines 1 :

A gauche au deuxième plan, 4 poubelles
A gauche un supermarché
Au moins un lampadaire
A droite des maisons récentes ou lotissement
Au premier plan à droite un panneau de signalisation

Marines 2  :

En haut à gauche, une fenêtre bizarre (typique du Vexin français pour monter les aliments comme le blé au grenier)
Au moins 8 fenêtres
Au centre au premier plan, un passage piéton
A droite une banque
Une rue en perspective en plein centre

Marines 3 :

En arrière-plan un lotissement (plusieurs maisons et pas une seule)
Une voiture sur la route
Au moins 5 arbres
Une ligne blanche au milieu de la route
Un champ de blé

Notes

[1Un croquis est une représentation cartographique sur un fond de carte. A la différence de cette dernière qui est exhaustive sur un thème donné, le croquis est synthétique et sélectionne donc les informations à représenter. Sans s’abstraire des lieux et donc à partir d’un fond de carte classique, il suppose une démarche analytique qui impose de modéliser les informations, de les classer et de les hiérarchiser, de les mettre en relation dans une perspective dynamique.

Un schéma est une représentation élaborée en vue d’une démonstration, il n’a pas de fond de carte. Il relève d’une démarche interprétative qui permet de mettre en évidence la structure et la dynamique des espaces étudiés que l’on représente par des signes porteurs de sens géographique sur des supports volontairement simplifiés.

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