Utiliser le PAD de l’ENT pour faire écrire de façon collaborative une classe

, par Hugo Michel

CAPACITÉS, VISÉES ET POINTS DES PROGRAMMES TRAVAILLÉS

« Le travail collaboratif motive les élèves en les rendant acteurs de leur apprentissage et en créant une émulation », « En travail de groupe, on valorise les intelligences multiples », « Le travail à plusieurs permet de développer l’entraide et l’autonomie ». Ces phrases qu’on peut entendre dans les établissements scolaires méritent d’être interrogées à l’aune du numérique, puisqu’une des principales caractéristiques des TICE est la possibilité de faciliter ce travail collaboratif entre les élèves.
Ainsi, outre la question du « Pourquoi collaborer ? » (et la différence avec la coopération, voir notamment les liens en fin d’article), se pose celle de « Comment collaborer ? ». Un outil de l’ENT, le PAD, facilite cette démarche. En voici un exemple d’utilisation.
Cette activité d’une heure a été proposée à un demi-groupe d’une classe de terminale baccalauréat professionnel (8 élèves), autour de la remédiation d’une épreuve de bac blanc en histoire. Les élèves sont positionnés individuellement sur des postes informatiques.

POINT DE DÉPART DE L’EXPÉRIMENTATION ET ANCRAGE DIDACTIQUE

On sait que dans les épreuves de baccalauréat, comme ailleurs, les élèves ont globalement du mal à ressentir le besoin de coucher toutes leurs connaissances sur leurs copies. De plus, la paraphrase des documents est également une approche à faire éviter à nos élèves. Ainsi, faire collaborer les apprenants afin qu’ils expriment toutes leurs connaissances peut être un axe à développer, du fait des méthodes d’écriture qui évoluent avec l’usage des téléphones mobiles notamment. Comme le note cet article du Café Pédagogique [1]
« on passe d’une écriture linéaire à une écriture spiralaire, d’une écriture à processus à une écriture à programme, susceptible de se projeter dans un temps long comme de faire retour sur elle-même par des corrections de type couper-copier-coller-déplacer-insérer … Ces gestes sont susceptibles de reconfigurer le « travail de l’écriture » jusqu’à l’Ecole pour y apprendre la prévision et la révision. Ne faut-il pas mieux prendre en considération ce « travail » en favorisant enfin le développement à l’Ecole de l’atelier d’écriture ? »
L’idée serait donc de faire construire un texte à plusieurs mains, répondant à une problématique posée par l’enseignant, autour de connaissances mutualisées par l’ensemble des élèves. C’est ainsi l’élève qui construit son propre savoir et qui devient acteur de son apprentissage, replaçant l’enseignant dans un rôle d’expert qui accompagne l’élève. C’est ce qu’on comprend dans une analyse comme celle de Cedric Lemery [2] :
"Il me semble que le web 2.0 en effaçant la frontière entre auteurs et lecteurs désinstitutionnalise le savoir. Dans la philosophie du web 2.0, chacun est pourvoyeur d’information. Bien entendu, cela semble en complète contradiction avec l’école telle qu’elle se pratique où l’enseignant est celui qui distribue l’information et valide la façon dont celle-ci a été intégrée par l’élève. Mais ce modèle me parait obsolète à l’heure où les élèves peuvent en quelques clics accéder à un savoir insoupçonné par les enseignants. Dans un modèle d’éducation 2.0, l’enseignant n’est plus le “dealer” de savoir mais un expert en “savoir”, c’est à dire qu’il sait comment relier les savoirs entre eux, comment faire des liens entre les savoirs et comment cartographier le savoir."

L’APPLICATION PAD DE L’ENT MONLYCEE.NET

- Qu’est-ce que le PAD proposé sur l’ENT monlycee.net ?
L’application PAD permet à plusieurs auteurs de travailler simultanément sur un même texte, en temps réel.
En plus d’être une application de traitement de texte, le pad met à disposition des outils pour faciliter la gestion de classe. En effet, on peut identifier les écrits de chacun par une couleur qui est attribuée individuellement à chaque auteur. De plus, tous les auteurs disposent de l’historique qui permet de voir ce qui a été rédigé. C’est bien pratique pour l’enseignant qui se demande qui est l’auteur d’un passage, afin de recentrer une réponse qui s’éloignerait du sujet, de questionner davantage… ou tout simplement de gérer les élèves.

- Comment créer / gérer le PAD sur l’ENT ?
La gestion du PAD est très simple. Il faut tout d’abord sélectionner l’application dans toutes celles disponibles sur l’ENT.

Il faut ensuite sélectionner « Créer un pad » et dans les informations demandées, à minima remplir le titre. Une fois cela fait, pour le partager à qui vous le souhaitez, cochez la case correspondant au pad à partager et sélectionnez « partager » dans le menu orange qui vient de s’ouvrir en bas de l’écran.

Le partage se fait en fonction de trois statuts : Lecteur, Contributeur et Gestionnaire.
Le statut de Lecteur n’attribue que la vision du pad ;
Le statut de Contributeur offre la possibilité d’écrire dans le pad ;
Le statut de Gestionnaire permet de gérer le pad, c’est-à-dire d’inviter davantage d’auteurs ou de supprimer le pad (en général, c’est donc l’enseignant -s’il est à l’initiative du pad – qui est Gestionnaire).
Dans l’exemple qui suit, les paramètres de partage ont été effectués différemment en fonction du statut de l’élève dans la classe et des choix de l’enseignant.
Comme le travail demandé était fait avec le groupe A de la classe des TCOM2, ceux-ci ont été placés en tant que contributeurs. Cependant, le travail nécessitant une remédiation en classe entière, le pad a également été partagé à l’ensemble de la classe en tant que lecteurs. Ainsi, le texte collaboratif est visible de toute la classe, mais n’a été utilisé pour travailler que par le groupe A.

EXEMPLE D’UTILISATION DE L’APPLICATION

Cette activité d’une heure a été proposée à un demi-groupe d’une classe de terminale baccalauréat professionnel (8 élèves), autour de la remédiation de deux questions d’une épreuve de bac blanc en histoire, avec pour objectif de faire comprendre qu’une réponse attendue au baccalauréat professionnel est un exercice d’écriture construit et abouti.
La première phase du travail consiste à faire un brouillon.
Une fois les élèves arrivés sur le pad, ils étaient invités à répondre aux deux questions sans rédiger de réponse, en ne mettant que leurs connaissances.

Les élèves ont commencé à répondre aux questions. On peut voir sur la capture d’écran qui suit plusieurs éléments :
1) Certains élèves ont commencé à mettre des réponses intéressantes ;
2) L’enseignant a pu accompagner les élèves en ajoutant des questions à leurs réponses ;
3) On remarque que c’est un nouvel élève (en rouge) qui complète les questions posées par l’enseignant ;
4) Certains élèves ont gardé le réflexe de rédiger ;
5) Un élève a commencé par copier/coller la réponse de ses camarades, semblant justifier qu’ainsi il travaillait. Cependant, on remarque que ce même élève (en noir) est également en train de compléter la réponse initiale.

La deuxième phase consiste à anonymer les réponses, afin de ne donner qu’un seul et même texte. Pour cela, il suffit de sélectionner « Effacer les couleurs identifiant les auteurs » sur la barre d’outils du pad. On arrive ainsi à cette forme de texte (au bout d’une dizaine de minutes après le début de l’activité) :

La troisième phase est celle du passage du brouillon à la rédaction. Celle-ci nécessite une étape préalable en supprimant les doublons de réponses et en réorganisant le texte. Cette dernière étape a été animée par l’enseignant, sur le vidéoprojecteur, avec les élèves en bloc classe. Cette étape a d’ailleurs permis aux élèves de préciser certains points.

S’en est suivi un retour au travail des élèves qui avaient pour consigne de rendre publiable ce texte.

POINT D’ARRIVÉE ET ÉLÉMENTS DE BILAN

Après ces trois étapes (réponses au brouillon, organisation du brouillon et rédaction) voici le texte qui est ressorti du travail des élèves à la fin de la séance.

Une fois cette tâche accomplie, un temps de réflexion critique sur la production a été proposé aux élèves, afin « de verbaliser réussites et difficultés et de faire le point sur les progrès accomplis et encore à faire sur le plan de la production textuelle et de l’habileté de coopération ». [3]

Il en est ressorti que les élèves étaient satisfaits de leurs travaux, puisque leurs réponses leurs semblaient globalement complètes. Cependant, plusieurs élèves ont exposé le fait qu’ils auraient davantage complété leurs réponses s’ils avaient été seuls. De plus, l’opération ayant été répétée sur le deuxième demi-groupe de cette classe (plus nombreux – 10 élèves), une élève qui a l’habitude de rédiger très vite ses réponses s’est retrouvée totalement dépassée par l’activité, ne comprenant pas pourquoi elle était menée.

Pour ma part, voici le bilan que j’en ai tiré :
Le pad de monlycee.net a bien permis la collaboration entre élèves et celle-ci s’est révélée fructueuse, notamment pour les élèves les plus en difficulté ne comprenant pas les attentes de l’épreuve du bac en histoire, qui ont été les plus bénéficiaires de cette activité. Ils ont ainsi eu l’occasion de saisir, grâce à l’accompagnement par leurs paires, qu’une réponse de bac est un processus d’écriture complexe et réfléchi, qui se travaille en plusieurs temps.
Je suis d’ailleurs globalement satisfait des éléments de réponses apportés. En effet, l’activité a été menée en début d’année de terminale et je pense que celle-ci a permis aux élèves de bien saisir l’esprit du baccalauréat, c’est-à-dire de mettre en valeur leurs connaissances dans une réponse.
A la répétition de cette activité avec d’autres classes, je suis en mesure d’apporter les éventuelles modifications suivantes :
 Le Pad peut également être utilisé en autonomie totale par les élèves en plus petits groupes, pour des travaux coopératifs comme la rédaction d’un exposé en groupe, par exemple.
 L’enseignant peut réguler le niveau de collaboration qu’il souhaite mettre dans son activité, en préparant à l’avance les lignes avec les prénoms des élèves. Cependant, ils interviennent moins dans les travaux de l’autre.
 L’utilisation du pad avec un groupe semble nécessiter un « temps de jeu », qui est en fait celui de la prise en main du pad, un temps utile pour l’appropriation individuelle de l’outil, y compris par des enseignants adultes. A chaque fois que j’ai utilisé cet outil pour une première fois, il y a toujours eu des apprenants qui ne respectaient pas les consignes et s’amusaient plus qu’autre chose. Comme l’utilisation de l’historique permet d’identifier ces personnes (et éventuellement de rétablir les textes supprimés), ce temps s’est finalement révélé assez court dans tous les groupes.

Hugo MICHEL
Lycée Henri Matisse de Trappes, Yvelines
Académie de Versailles

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